Defaut de paiement.

Lorsque je suis arrivée au Centre ce matin, j'ai bien sentie que l'ambiance tournait a l'orage. Les filles faisaient des messes basses dans tous les coins, se cachaient pour parler oubliant du même coup leur obligations professionnelles.

D'ordinaire, je me mêle peu des discussions, des chuchotements mais quand le travail en pâti, je vois rouge. Alors j'ai innocemment demande ce qui se passait, histoire d'ouvrir la discussion et que tout le monde puisse se remettre au travail rapidement:

-"Mais tu n'as pas vu le mot affiche a la porte, me répondis ma collègue outrée. Va voir."

D'un pas assure, je suis allée voir la note que la direction avait placardee, mes collègues sur les talons.

-"Tu comprends ce que cela veut dire?m'interrogea-t-elle. Cela signifie que le mois prochain, nous ne recevrons que la moitie de notre salaire et que probablement nous ne toucherons pas le treizième mois."

Je connais mes collègues, leur problèmes d'hipotheques, des situations familiales compliquées, des mères célibataires, des pères au chômage ou en fin de droit...les priver d'une partie de leur salaire, revient a le plonger dans le trou des emprunts, des découverts. Elles travaillent dures, leur métier est difficile car c'est épuisant de travailler avec des personnes âgées, incontinentes et souvent invalides. Nombreuses sont celles qui ont une vrai vocation pour ce métier mais ce n'est pas du bénévolat. Il est normal d'être paye pour un travail, les priver d'une partie de leur salaire sans donner plus d'explication qu'une feuille tapée a la machine, même pas le courage de venir leur expliquer en face.

Recevoir une paie pour ce que l'on fait est valorisant, stimulant; leur enlever met en péril leur travail, leur professionnalisme et met en danger les patients eux mêmes qui paieront en fin de chaîne les mesures de la direction, c'est révoltant mais inévitable, il faut être lucide.

Je ne suis pas syndicaliste mais je trouve cela anormal de mettre des employées au pied du mur. Déjà, a la base, les salaires sont maigres mais la, je ne sais vraiment pas comment cela va se passer.

Il y a eu une réunion a l'heure du déjeuner, je suppose qu'elle n'a rien donne, les ordres viennent d'en haut, on ne peut revenir dessus. Elles essaient de se battre, de défendre leur statuts mais que faire lorsque la machine est lancée, surtout que ce n'est pas la première fois qu'elles subissent les restrictions budgétaires.

Pour moi, c'est diffèrent, je sais ce que c'est de travailler certains mois pour ne rien gagner et de me rattraper plus tard, je connais les taxes, les échéances, j'ai aussi une entreprise ou jours de congés et semaines de vacances restent des mots abstraits, ou les heures supplémentaires s'additionent a l'infini. Bien que je ne sois pas d'accord, je comprend qu'une société puisse en arriver la, que les dettes s'accumulent, que la gestion de comptabilité a pu être mal faite (et oui, on est quand même en Espagne!!).

Mais je comprend aussi leur colères, leur doutes sur l'avenir. Nous verrons dans les prochaines semaines ce qui va se passer, j'espere seulement qu'elles se montreront professionnelles jusqu'au bout...et la, rien n'est moins sur concernant certaines desabusees, demotivees...