Cette autre et moi.

J'ai la tête embrouillée, enfumée par les rêves qui m'ont habite la nuit dernière. Plusieurs fois cette nuit je me suis réveillée pour mettre fin a la tournure infernale que prenait mes songes, peine perdue a chaque fois que je me rendormais ils revenaient sous d'autres formes mais porteurs du même message. Je connais l'origine. La journée je peux lutter contre mes idées noires mais la nuit, il n'y a plus aucun rempart protecteur, l'inconscient prend le dessus et me met KO.

Pourtant, aujourd'hui tout va bien, il est loin le temps des interrogations, des doutes et des fustigations mais il a fallu que mon beau frère se retrouve dans la même situation que moi 8 ans plus tôt pour que tout revienne.  Je connais le chemin de ses pensées, les détours que son esprit fait pour éviter de souffrir mais quoi qu'il arrive la chute est inévitable.

Il doit le savoir, comme je l'ai appris a mes dépends. On peut se débattre, retourner le sens des mots, re-interpréter les situations, l'evidence de la trahison a une odeur, on la reconnaît comme un animal sent le danger.

Et puis nous avons nettoyé le camion hier. En passant l'aspi sur les tapis de sol, j'ai vu la photo que le Rital avait colle sur le tableau de bord. Un tryptique avec les enfants et moi ...avant, avant que tout cela n'arrive. Un bonheur tranquille et simple, la certitude d'avoir crée une famille soudée, je regardais l'objectif avec sérénité et bienveillance; dans mes yeux, je peux lire la confiance en l'autre. Aujourd'hui je refuse les photos ou quand je n'ai pas le choix, que l'on tente de me prendre par surprise, je baisse la tete. Le plus souvent c'est moi qui les prends, cela résout les problèmes. Je ne suis pas capable de lire ce que mon regard suggère.

Parfois j'aimerai redevenir celle que j'etais avant. Le camion me renvoit a cette époque douce, a ces vacances ou l'on emmenait la moto et le lit parapluie, aux sièges trop durs qui me matraquaient les reins, a l'allaitement. Trop de souvenirs qui marquent la fin du bonheur naïf.

En Espagne, nous n'utilisons que rarement le camion et nous ne partons plus en vacances. La douleur de la mémoire, les stigmates du temps qui passent me laissent un goût amer. Pourtant physiquement je n'ai pas beaucoup change, juste ce regard qui s'est endurci au point d'en être glacial, a ses lèvres qui se serrent trop souvent pour ne pas hurler, a ces pilules que j'ingere pour me supporter. Sinon, la carcasse est la même c,est jute l'interieur qui est pourri et ça les photos ne le montrent pas. Du moins pour le moment.

La vision de cette autre m'a profondément ébranlée. Si on lui avait dit ce qu'elle allait devoir endurer, aurait elle pris une autre route? Moi, j'ai choisi de rester mais a quel prix puisque mes nuits sont souvent peuples de ce que mon conscient refoule. Et lui, que choisira-t-il?

Il vient en fin de semaine prochaine nous voir, besoin de prendre du recul, de changer d'air. Le Rital et moi en avons parle et sommes arrives a la même conclusion mais étonnement ou non, pas par les mêmes chemins de réflexions. Me serai-je donc trompée, ce qu'il attendait peut être a ce moment la, 8 ans en arrière est que je prenne la décision de partir. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas de ma bouche qu'il entendra le verdict, je vais écouter et me taire car qui mieux que moi sait que seules sont valables les décisions que l'on prend pour soi même sans tenir compte de l'avis d'autrui.

J'ai le cerveau qui fume noir.